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dont peut être tiré le revenu public, sans entraver la production, ce sont les impôts sur les monopoles, car le profit du monopole est en lui-même une taxe levée sur la production, et le taxer, c’est simplement faire entrer dans les coffres publics ce que la production doit toujours payer.

Il y a parmi nous différentes sortes de monopoles. Il y a par exemple les monopoles temporaires créés par les patentes et les lois sur la propriété littéraire. Il serait extrêmement injuste et maladroit de les taxer, car ils ne sont que la reconnaissance du droit du travail à ses productions non tangibles, et constituent la récompense de l’invention et du travail littéraire ou scientifique. Il y a également les monopoles onéreux, auxquels j’ai fait allusion dans le chapitre iv du livre III, et qui résultent de l’agrégation des capitaux dans les affaires qui sont de la nature des monopoles. Mais comme il serait extrêmement difficile, sinon impossible, de lever des taxes par une loi générale, de façon à ce qu’elles pèsent exclusivement sur les revenus de semblables monopoles, et ne se transforment pas en taxes sur la production ou sur l’échange, il vaudrait beaucoup mieux que ces monopoles soient abolis. Ils naissent en grande partie de défectuosités législatives ; par exemple, si les marchands de San-Francisco sont forcés de payer plus pour les marchandises envoyées directement de New-York à San-Francisco par la voie de l’Isthme, qu’il ne faut payer pour les envoyer par bateau de New-York à Liverpool ou à Southampton puis de là à San-Francisco, la raison dernière en est dans les lois « protectionnistes » qui font qu’il est si coûteux de construire des steamers américains, et qui empêchent les steamers étrangers de faire le transport des marchandises entre les ports américains. La raison qui fait que les résidents de l’État de Nevada sont forcés de payer autant, que leurs marchandises viennent de l’Est, ou qu’elles soient portées à San-Francisco, puis ramenées, c’est que l’autorité qui empêche les extorsions de la part des charretiers de louage, ne s’exerce pas sur une compagnie