Page:Henry George - Progrès et Pauvreté.djvu/378

Cette page a été validée par deux contributeurs.

frontières, où la terre avait été partagée entre les colons militaires, où les usages primitifs survécurent plus longtemps. Mais les latifundia qui avaient dévoré la force de l’Italie, se répandirent constamment, couvrant la surface de la Sicile, de l’Afrique, de l’Espagne, de la Gaule, de grandes propriétés cultivées par des esclaves ou des fermiers. Les vertus solides, nées de l’indépendance personnelle, s’éteignirent, une agriculture épuisante appauvrit l’âme, les bêtes sauvages remplacèrent les hommes, jusqu’à ce que, à la fin, avec une force nourrie dans l’égalité, les barbares vinrent tout envahir ; Rome périt ; et il ne resta que des ruines d’une civilisation si fière.

C’est ainsi qu’arriva cette chose étonnante, qui, au temps de la grandeur de Rome, aurait semblé aussi impossible qu’il nous semble à nous que les Comanches et les Têtes-Plates puissent conquérir les États-Unis, ou que les Lapons puissent désoler l’Europe. On doit chercher la cause fondamentale de cette ruine dans la tenure de la terre. D’un côté la négation du droit commun à la terre a eu pour résultat la décadence ; de l’autre l’égalité a produit la force.

« La liberté, » dit M. de Laveleye (Propriété Primitive, p. 116 de l’édition anglaise), « la liberté et par conséquent la possession d’une part non divisée de propriété commune, à laquelle avait droit le chef de chaque famille dans le clan, étaient des droits essentiels dans le village germain. Ce système d’égalité absolue imprima un caractère remarquable à l’individu, ce qui explique comment de petites bandes de barbares firent la conquête de l’empire romain, en dépit de son administration habile, de sa parfaite centralisation, de sa loi civile qui a conservé le nom de raison écrite. »

Une autre cause fut que le grand empire était atteint au cœur. « Rome périt » dit le professeur Seeley, « parce que la moisson des hommes fit défaut. »

Dans ses leçons sur l’Histoire de la civilisation en Europe, et plus complètement dans ses leçons sur l’Histoire de la civi-