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de l’agriculture eut imposé la nécessité de reconnaître la possession exclusive de la terre, afin d’assurer la jouissance exclusive des résultats du travail dépensé en la cultivant. La division de la terre entre les unités industrielles, familles, familles groupées, ou individus, ne se fit qu’autant que cela était nécessaire, les pâturages et les forêts étant conservés comme biens communs, et l’égalité pour les terres cultivables étant assurée, soit par une nouvelle division périodique, comme parmi les races teutoniques, soit par la prohibition de l’aliénation, comme dans la loi mosaïque.

Cette organisation primitive subsiste encore, sous une forme plus ou moins pure, dans les villages et communautés de l’Inde, de la Russie, dans les pays encore slavons ou soumis, jusqu’à ces derniers temps, à la loi turque ; dans les cantons montagneux de la Suisse, parmi les Kabyles du nord de l’Afrique, et les Kaffirs du sud ; parmi la population native de Java, et les Aborigènes de la Nouvelle-Zélande, c’est-à-dire là où les influences extérieures n’ont pas altéré la forme de l’organisation sociale primitive. Cette forme a partout existé, ainsi que l’ont prouvé abondamment les recherches récentes de bien des savants et des observateurs indépendants ; ces recherches sont résumées de la façon la plus complète (à ma connaissance) dans les Systèmes de fermages dans les différents pays, publiés par le Cobden-Club, et dans la Propriété primitive, de M. de Laveleye ; je renvoie à ces ouvrages le lecteur désireux de connaître cette vérité dans tous ses détails.

« Dans toutes les sociétés primitives, » dit M. de Laveleye, à la suite de recherches n’ayant laissé inexplorée aucune partie du monde, « dans toutes les sociétés primitives, le sol était la propriété commune de la tribu, et était sujet à la distribution periodique entre les familles, de façon à ce que toutes pussent vivre de leur travail, comme la nature l’a ordonné. L’aisance de chacun était ainsi proportionnée à son énergie et à son intelligence ; personne, à aucun degré, n’était privé des moyens de