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elle est la grande cause à laquelle il faut attribuer la pauvreté, la misère, la dégradation, les plaies sociales, la faiblesse politique qui se montrent si menaçantes au milieu du progrès de la civilisation. L’utilité se joint donc à la justice pour demander que nous l’abolissions.

Quand l’intérêt et la justice s’unissent ainsi pour demander l’abolition d’une institution qui n’a pas de fondement plus solide qu’une simple réglementation municipale, quelle raison d’hésiter peut-il y avoir ?

La considération qui semble causer cette hésitation, même de la part de ceux qui voient clairement que de droit la terre est propriété commune, est celle-ci : on a permis si longtemps que la terre soit considérée comme propriété privée, qu’en abolissant cette habitude on ferait tort à ceux qui ont cru pouvoir baser leurs calculs sur sa durée ; en permettant de posséder la terre comme si la chose était juste, on commettrait, en rétablissant les droits communs, une injustice envers ceux qui ont acheté la terre avec ce qui était sans aucun doute leur légitime propriété. Donc on soutient que, si nous abolissons la propriété privée de la terre, la justice demande que nous donnions une compensation complète à ceux qui possèdent aujourd’hui des terres, de même que le gouvernement anglais, en abolissant la vente et l’achat des commissions militaires, se sentit obligé de donner une compensation à ceux qui avaient des commissions, qui les avaient achetées dans la croyance qu’ils pourraient les vendre, de même que le gouvernement anglais abolissant l’esclavage dans ses colonies des Indes occidentales, paya 100 millions de dollars aux propriétaires d’esclaves.

Herbert Spencer lui-même, après avoir clairement démontré dans ses Social statics que tout titre par lequel on réclame la possession exclusive de la terre n’a pas de valeur, appuie cette idée de compensation (ce qui me semble être une inconséquence) en déclarant que l’estimation juste et la liquidation des droits des propriétaires actuels « qui, soit par leurs propres