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puissance, veut annuler ces titres, on ne pourra rien objecter au nom de la justice. Il a existé des hommes qui avaient le pouvoir de prendre ou de donner la possession exclusive de portions de la surface de la terre, mais quand et où a-t-il existé un homme en ayant le droit ?

Le droit à la possession exclusive de toute chose produite par l’homme, est clair. Quel que soit le nombre de mains par lesquelles cette chose a passé, le travail humain était au commencement de la chaîne, il y avait un homme qui l’ayant procurée ou produite par ses efforts, avait sur elle un droit évident, à l’exclusion du reste du genre humain, droit qui pouvait justement passer d’une personne à une autre par vente ou par donation. Mais à la fin de quelle suite de conventions ou de concessions peut-on montrer ou supposer un droit semblable sur une partie quelconque de l’univers matériel ? On peut montrer un titre original de ce genre donnant droit à la possession d’une amélioration ; mais ce titre est pour l’amélioration et non pour la terre elle-même. Si je défriche une forêt, dessèche un marais, ou comble une fondrière, tout ce que je peux justement réclamer, c’est la valeur donnée par ces efforts. Ils ne me donnent pas droit à la terre elle-même, pas d’autre droit qu’à ma part égale à celle de tout autre membre de la communauté dans la valeur qui y est ajoutée par le développement de la communauté.

Mais on dira : il y a des améliorations qui, avec le temps, ne peuvent plus se distinguer de la terre elle-même ! Très bien ; alors le titre à l’amélioration se mêle au titre à la terre ; le droit individuel se perd dans le droit commun. C’est le plus grand qui absorbe le moindre, et non le moindre qui absorbe le grand. La nature ne procède pas de l’homme ; mais l’homme de la nature, et c’est dans le sein de la nature que lui et toutes ses œuvres doivent retourner.

On dira encore : comme chaque homme a le droit de se servir et de jouir de la nature, l’homme qui fait usage de la terre doit avoir la permission de s’en servir exclusivement, afin qu’il