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la même — deux mains viennent toujours au monde avec une bouche, il y a toujours vingt et un garçons pour vingt filles ; et la demande de travail existera aussi longtemps que les hommes désireront les choses que le travail seul peut procurer. Nous parlons de « manque d’ouvrage, » mais évidemment ce n’est pas l’ouvrage qui manque alors que les besoins sont les mêmes ; évidemment, l’offre de travail ne peut pas être trop grande, ni la demande trop petite, quand le peuple souffre du manque des choses que le travail produit. La cause réelle de la crise doit être qu’en quelque lieu, quelque obstacle empêche l’offre de satisfaire la demande, et que cet obstacle empêche le travail de produire les choses dont a besoin le travailleur.

Prenons un individu parmi ces masses d’hommes inoccupés ; bien qu’il n’ait pas lu Malthus, il lui semble aujourd’hui qu’il y a trop de gens dans le monde. Dans ses propres besoins, dans la misère de sa femme anxieuse, dans les pleurs de ses enfants grelottant, souvent affamés et à peine soignés, il y a bien une demande de travail suffisante, les Cieux le savent ! L’offre est dans ses propres mains. Mettez-le dans une île déserte, et, bien que privé des avantages énormes que donnent aux forces productives de l’homme la coopération, et les machines d’une communauté civilisée, il saura avec ses deux mains remplir les bouches et couvrir les dos qui dépendent de lui. Et c’est ce qu’il ne peut pas faire là où la puissance productive est à son plus haut point de développement. Pourquoi ? N’est-ce pas parce que dans un cas il a le libre accès des forces et des substances naturelles, tandis que dans l’autre on lui refuse cet accès ?

N’est-ce pas ce fait seul, — le refus de l’accès à la nature, qui peut expliquer l’état de choses qui force les hommes à être oisifs alors que bien volontiers ils travailleraient pour satisfaire leurs besoins ? La cause prochaine de l’oisiveté forcée d’une masse d’hommes, peut être la cessation de la demande de la part d’autres hommes pour les choses particulières qu’ils produisent ; mais remontez d’une cause à une autre, d’une occu-