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remplis, les steamers se rouillant, les moulins arrêtés, les ouvriers oisifs, comme prouvant une cessation de demande effective, ce qui, dit-elle, résulte évidemment de ce fait que le peuple, affolé par une prospérité fictive, a vécu avec un luxe qui dépassait ses moyens, et est maintenant obligé de se réduire, c’est-à-dire de consommer moins de richesse. Elle cite de plus l’énorme con sommation de richesse que fait la guerre, la construction des chemins de fer non rémunérateurs, les prêts aux gouvernements banqueroutiers, etc., disant que ce sont des folies qui, bien que non constatées sur le moment, doivent être contre-balancées par une saison de consommation réduite.

Il est évident que chacune de ces théories exprime un côté, ou une phase, d’une vérité générale, mais que ni l’une ni l’autre ne donnent l’intelligence complète de la vérité entière. Chacune ne donne qu’une explication absurde du phénomène. Car, alors que la grande masse des hommes a besoin de plus de richesse qu’elle ne peut en gagner, et alors qu’elle consentirait à donner pour la gagner ce qui est la base et la matière première de la richesse-son travail — comment peut-il y avoir excès de production ? Et alors que le mécanisme de production se détériore et que les producteurs sont condamnés à une oisiveté involontaire, comment peut-il y avoir excès de consommation ?

Quand, avec le désir de consommer plus, existe la possibilité et la volonté de produire plus, on ne peut attribuer la paralysie commerciale et industrielle à l’excès de production ni à l’excès de consommation. Évidemment la crise vient de ce que la production et la consommation ne peuvent ni s’entendre, ni se satisfaire.

Comment naît cette impossibilité ? Elle est évidemment, et de l’assentiment général, le résultat de la spéculation. Mais de la spéculation appliquée à quoi ?

Certainement pas de la spéculation appliquée aux choses qui sont les produits du travail, aux productions minérales ou agri-