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donne au même travail un résultat plus considérable, équivalant à un accroissement des capacités naturelles de la terre ; je veux dire qu’il produit une puissance supérieure de travail qui est localisée sur la terre, qui ne s’attache pas au travail en général, mais seulement au travail qui s’exerce sur une terre particulière, et qui, par conséquent, est inhérente à la terre aussi bien que les qualités du sol, le climat, les dépôts minéraux, la situation naturelle, et passe comme ceux-ci avec la possession du sol.

Une amélioration dans la méthode de culture, qui, avec le même déboursé, produira deux récoltes au lieu d’une, ou une amélioration dans les instruments ou les machines qui doublera le résultat du travail, aura manifestement, sur une pièce particulière de terrain, le même effet sur le produit que si l’on doublait la fertilité du sol. Mais la différence réside en ce que l’amélioration de méthode ou d’outils peut être utilisée sur n’importe quelle terre, tandis que l’augmentation de fertilité ne peut être utilisée que sur la terre particulière où on l’a produite. Enfin l’accroissement de force productive du travail qui naît de l’accroissement de population ne peut, en grande partie, être utilisé que sur une terre particulière, et, sur cette terre particulière, à des degrés très variables.

Supposons une savane sans limites, si étendue dans son uniformité, avec son herbe, ses fleurs, ses arbres, ses petits ruisseaux, que le voyageur se fatigue de cette monotonie. Le chariot du premier émigrant s’avance. Où campera-t-il ? le colon ne peut le dire, un acre semble aussi bon qu’un autre. Il n’y a absolument à faire aucun choix d’ombrage, d’eau, de fertilité, de situation ; il est embarrassé de cette richesse. Fatigué de chercher une place meilleure qu’une autre, il s’arrête n’importe où et se met à se construire une maison. Le sol est vierge et riche, le gibier abondant, les ruisseaux regorgent de truites. La nature est aussi généreuse que possible. Il a là ce qui, dans un pays peuplé, le ferait riche ; mais il est très pauvre. Pour ne rien dire de son état men-