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ficile de ne pas croire que quelques-uns ont nettement vu cette loi ; mais, redoutant les conclusions pratiques auxquelles elle les aurait conduits, ils ont préféré l’ignorer, la voiler, plutôt que de s’en servir comme de la clef des problèmes qui les embarrassaient. Une grande vérité à dire à un siècle qui l’a rejetée et foulée aux pieds, n’est pas une parole de paix, mais une parole de guerre.

Il serait peut-être bon, avant de terminer ce chapitre, de rappeler au lecteur, ce que j’ai déjà dit, que j’emploie le mot salaire comme représentant non une quantité, mais une proportion. Quand je dis que les salaires baissent quand la rente monte, je ne veux pas dire que la quantité de richesse obtenue par les travailleurs sous forme de salaires est nécessairement moindre, mais que la proportion qu’elle représente par rapport à l’ensemble du produit est nécessairement moindre. La proportion peut diminuer alors que la quantité reste la même ou s’accroît. Si la limite de la culture descend d’un point productif que nous appellerons 25, à un point productif que nous appellerons 20, la rente de toutes les terres qui auparavant payaient une rente, augmentera de cette différence, et la proportion du produit entier qui allait comme salaire aux travailleurs, diminuera d’autant ; mais si dans l’intervalle, les progrès de l’industrie, ou les économies que rend possible l’accroissement de population, ont tellement augmenté la force productive du travail que, au point 20, le même travail produit autant de richesse qu’autrefois au point 25, alors les ouvriers recevront comme salaires une quantité aussi grande qu’autrefois, et la baisse relative des salaires ne se fera sentir par aucune diminution des nécessités ou de l’aisance de la vie de l’ouvrier, mais se fera seulement sentir par un accroissement de la valeur de la terre, par les revenus plus grands et les dépenses plus fortes de la classe touchant les rentes.