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rieure soit meilleure, et qu’il n’y ait personne qui ne puisse gagner de quoi vivre, il n’y a personne gagnant beaucoup plus, personne ou presque personne pouvant vivre dans une condition qu’on qualifierait de luxueuse ou de confortable dans un vieux pays. Ce qui revient à dire que dans les vieux pays la consommation de la richesse est, en proportion de la population, plus grande, bien que la proportion de travail consacrée à la production de la richesse soit moindre, ou que moins de travailleurs produisent plus de richesse ; car la richesse doit être produite avant d’être consommée.

On peut cependant dire que la richesse supérieure des vieux pays est due non à la supériorité de puissance productive, mais aux accumulations de richesse que les pays nouveaux n’ont pas encore eu le temps de faire.

Il est convenable d’examiner un instant cette idée d’accumulation de richesse. La vérité est que la richesse ne peut être accumulée que jusqu’à un certain degré peu considérable, et que la communauté vit réellement, comme le fait la grande majorité des individus, de la main qui récolte la nourriture pour la bouche. La richesse ne souffre pas les grandes accumulations,sauf peut-être sous quelques formes peu importantes qu’elle ne garde pas. La matière de l’univers qui, lorsque le travail lui a fait prendre des formes désirables, constitue la richesse, tend constamment à revenir à son état primitif. Quelques formes de la richesse dureront quelques heures, ou quelques jours, ou quelques mois, ou quelques années ; il y a quelques formes rares de la richesse qui peuvent se transmettre d’une génération à une autre. Prenons la richesse sous quelques-unes de ses formes les plus utiles et les plus durables, vaisseaux, maisons, chemins de fer, machines. À moins qu’on ne travaille sans cesse à les réparer, à les renouveler, elles sont presque immédiatement hors d’usage. Arrêtez le travail dans une communauté quelconque, et la richesse disparaîtra comme s’arrête le jet d’une fontaine quand on empêche l’eau d’y arriver. Que le