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attribue à l’excès de population. J’affirme que les nouvelles bouches qu’un accroissement de population appelle à l’existence ne demandent pas plus de nourriture que les anciennes, et que les mains qui les accompagnent peuvent, dans l’ordre naturel des choses, produire davantage. J’affirme que, les autres circonstances étant égales, plus grande est la population, plus grande serait l’aisance qu’une distribution équitable de la richesse donnerait à chacun. J’affirme que dans un état d’égalité, l’accroissement naturel de population tendrait constamment à rendre les individus plus riches et non plus pauvres.

J’engage nettement la discussion, et soumets la question à l’épreuve des faits.

Mais n’oublions pas (car au risque de me répéter je veux mettre avant tout le lecteur en garde contre une confusion qu’ont faite les auteurs les plus réputés), n’oublions pas, dis-je, que la question de fait dans laquelle se résout la discussion n’est pas celle-ci : à quel moment du progrès de la population y a-t-il le plus de nourriture produite ? mais celle-ci : à quel moment du progrès de la population la plus grande force de production de richesse s’est-elle montrée. Car la force de production de richesse renferme toutes les formes de la force de production de subsistance, et la consommation de la richesse sous une forme quelconque, ou de la puissance productive de richesse, équivaut à la consommation de la subsistance. J’ai par exemple quelque argent dans ma poche. Je peux acheter avec, ou des aliments, ou des cigares, ou des bijoux, ou des billets de théâtre, et en dépensant mon argent je détermine le travail à produire des aliments, des cigares, des bijoux, des représentations théâtrales. Une parure de diamants a une valeur égale à celle de tant de sacs de farine, c’est-à-dire qu’il faut en moyenne autant de travail pour produire les diamants qu’il en faudrait pour produire autant de farine. Si je charge ma femme de diamants, c’est aussi bien l’exercice de la puissance productrice de subsistance que si dans un but d’ostentation, j’avais dépensé une valeur égale de nour-