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doue dans son ensemble a été appauvrie d’une façon épouvantable sous notre domination, et que cela continue avec une rapidité effrayante ; » voilà un exposé des choses dont la vérité ne peut être mise en doute, vu les faits présentés non seulement par les écrivains que j’ai cités, mais par des employés de l’administration de l’Inde. Les efforts faits par le gouvernement pour diminuer les famines n’ont fait que rendre plus intense et plus générale leur cause réelle, puisque ces efforts se sont traduits par une augmentation d’impôts. Bien que dans la récente famine de l’Inde du sud, on estime qu’il ait péri six millions d’hommes et que les survivants soient entièrement dépouillés, cependant les taxes n’ont pas été diminuées ou remises, et l’impôt sur le sel qui empêchait déjà les pauvres gens de se servir de cet utile aliment, fut augmenté de 40 p. 0/0, de même qu’après la terrible famine du Bengale en 1770 les revenus s’accrurent parce qu’on augmenta les impôts sur les survivants, et qu’on s’y prit d’une façon plus sévère pour les recueillir.

Dans l’Inde d’aujourd’hui comme dans celle d’autrefois, c’est seulement en n’ayant qu’une vue superficielle des choses qu’on peut attribuer le besoin et la famine à l’excès de population et à l’incapacité du sol de produire assez. Si les cultivateurs pouvaient conserver leur petit capital, s’ils pouvaient échapper à cette saignée qui, même dans les années moyennes, réduit de grandes masses d’entre eux à vivre avec moins qu’il n’en faut aux cipayes, moins que n’en donne aux prisonniers l’humanité anglaise, l’industrie se réveillerait, prendrait des formes plus productives, et suffirait certainement à nourrir une population plus considérable. Il y a encore dans l’Inde de grands espaces incultes, de grandes ressources minérales non employées, et il est certain que la population de l’Inde n’a pas atteint et n’a jamais atteint, dans les temps historiques, la limite réelle que lui imposent les ressources du sol pourvoyant à sa subsistance, ni même le point où ces ressources diminuent avec l’accroissement