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« sont avant tout des famines financières. Les hommes et les femmes ne peuvent gagner leur nourriture parce qu’ils ne peuvent amasser de l’argent pour l’acheter. Cependant nous sommes forcés, disons-nous, d’imposer davantage ce peuple. » Et il montre comment, des pays frappés par la famine eux-mêmes, on exporte la nourriture comme paiement des impôts, comment l’Inde entière est soumise à des saignées continuelles et épuisantes qui, combinées avec les énormes dépenses du gouvernement, rendent d’année en année le pays plus pauvre. Les exportations de l’Inde sont presque exclusivement composées de produits agricoles. Pour au moins un tiers de ceux-ci il ne rentre rien dans le pays, car ces produits représentent le tribut, les lettres de change tirées par les Anglais sur les Indes, ou les dépenses de la branche anglaise du gouvernement de l’Inde[1]. Ce qui, pour le reste, retourne dans l’Inde consiste en munitions pour le gouvernement, ou en articles de luxe employés par les maîtres anglais de l’Inde. M. Hyndman montre que les dépenses du gouvernement ont considérablement augmenté sous la domination impériale ; que les impôts qui pèsent sur une population si pauvre que les masses ne sont qu’à moitié nourries, lui enlèvent ses derniers moyens de cultiver le sol ; que le nombre des jeunes bœufs (l’animal de trait des Hindous) diminue, et que les rares instruments de culture sont engagés chez les usuriers, car « nous, un peuple d’affaires, nous forçons les cultivateurs à emprunter à 12, 24, 60 pour cent[2] pour construire et payer l’intérêt de la dépense, de grands travaux publics qui n’ont jamais rendu cinq pour cent. » M. Hyndman écrit : « La vérité est que la société hin-

  1. Dans un article récent sur les emprunts proposés à l’Inde, le professeur Fawcett appelle l’attention sur des articles comme ceux-ci : 1,200 livres sterling pour l’équipement et la traversée d’un membre du Conseil du Gouverneur général ; 2,450 livres pour l’équipement et la traversée des évêques de Calcutta et de Bombay.
  2. Florence Nightingale dit que le taux de 100 pour 100 est commun et que même alors le cultivateur est pillé de la façon qu’elle indique. Il est à peine nécessaire de dire que ces taux, comme ceux du prêteur sur gages, ne sont pas de l’intérêt, au sens économique du mot.