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de subsistance, que ne l’était la ruine du Karnatic, quand les cavaliers d’Hyder-Ali y avaient passé comme un tourbillon destructeur.

Les millions d’habitants de l’Inde ont courbé le cou sous le joug de bien des conquérants, mais le pire de tous c’est celui de la domination anglaise constante et écrasante, dont le poids pousse positivement hors de l’existence des millions d’hommes et qui, ainsi que le montrent les écrivains anglais, tend inévitablement à une catastrophe effrayante et énorme. D’autres conquérants ont habité le pays, et bien que mauvais et tyranniques, ont compris le peuple et ont été compris de lui ; mais aujourd’hui l’Inde est comme un grand domaine possédé par un propriétaire étranger et toujours absent. Une administration civile et militaire très considérable est entretenue et remplie par les Anglais qui regardent l’Inde comme un lieu d’exil temporaire ; et une somme énorme, estimée à 20,000,000 de livres au moins, annuellement levée sur une population où les ouvriers sont, dans bien des endroits et lorsque les temps sont bons, heureux de travailler en recevant de 1 dime (environ 0, 50 centimes) ou 1 dime 1/2, à 4 dimes par jour, s’en va en Angleterre sous forme de remises, de pensions, de charges du gouvernement, etc., sans qu’il y ait jamais compensation. Les sommes immenses dépensées en chemins de fer ont été, au point de vue économique, improductives ainsi que le montrent les revenus ; les grands travaux d’irrigation ont été pour la plupart de coûteux insuccès. Dans plusieurs régions importantes de l’Inde, les Anglais, dans leur désir de créer une classe de propriétaires terriens, ont mis le sol en la possession absolue des récolteurs héréditaires d’impôts, qui l’affermèrent sans merci aux cultivateurs, aux taux les plus élevés. Dans d’autres régions où l’État perçoit lui-même l’impôt sous forme de taxe sur la terre, le taux en est si élevé et il est recueilli avec tant de dureté, que les ryots, qui, dans les bonnes saisons, ne récoltent que juste ce qu’il leur faut pour vivre, tombent