Page:Henry George - Progrès et Pauvreté.djvu/114

Cette page n’a pas encore été corrigée

sage précédemment cité, que la théorie de la population exposée par Malthus est apparue pour donner une preuve décisive de la théorie des salaires formulée par Smith.

Ricardo, qui peu d’années après la publication de l’Essai sur la population corrigeait l’erreur dans laquelle était tombé Smith sur la nature et la cause de la rente, fournit à la théorie de Malthus un nouvel appui en appelant l’attention sur ce fait que la rente devrait augmenter à mesure que les besoins d’une population s’accroissant, forceraient à cultiver des terres de moins en moins productives, ou des points de moins en moins productifs de ces mêmes terres, ce qui expliquerait la hausse de la rente. C’est ainsi que se forma la triple combinaison dans laquelle la théorie de Malthus se trouva étayée de deux côtés, – par la théorie des salaires antérieurement acceptée, et par la théorie plus récente de la rente, qui toutes deux offraient des exemples spéciaux de l’opération du principe général auquel est attaché le nom de Malthus, – la baisse des salaires et la hausse des rentes qui suivent l’accroissement de population n’étant que des modes différents où se manifeste la pression de la population sur la subsistance.

Ayant ainsi pris sa place dans la charpente même de l’économie politique (car cette science n’a subi aucun changement ou amélioration matériels depuis Ricardo, bien qu’elle ait été éclaircie dans quelques points secondaires), la théorie de Malthus, bien qu’incompatible avec les sentiments déjà cités, ne l’est pas avec d’autres idées qui, dans les pays anciens au moins, dominent en général dans les classes ouvrières ; au contraire elle s’harmonise avec elles comme le fait la théorie des salaires qui lui sert d’appui, et qu’elle supporte à son tour. Pour l’artisan la cause des salaires bas, et de l’impossibilité de trouver du travail, c’est évidemment la compétition causée par la pression du nombre, et dans les demeures malpropres de la pauvreté qu’est-ce qui paraît plus clair que le trop grand nombre d’individus ?