Page:Henry George - Progrès et Pauvreté.djvu/113

Cette page n’a pas encore été corrigée

tique indiscutable, — la population augmentant continuellement doit finir par dépasser ce que la terre peut fournir de nourriture et même d’espace la théorie de Malthus est encore soutenue par des analogies existant dans le règne animal et végétal, où la vie lutte partout contre les barrières qui tiennent en échec les différentes espèces, analogies aux quelles la pensée moderne, en détruisant les distinctions entre les différentes formes de la vie, a donné une valeur de plus en plus grande ; de plus bien des faits saillants semblent la confirmer : par exemple la prédominance de la pauvreté, du vice, de la misère parmi les populations denses ; l’effet général du progrès matériel qui augmente la population sans soulager la pauvreté ; la croissance rapide du nombre des habitants dans les pays nouvellement exploités, et l’évident retard apporté à cette augmentation, dans les pays plus peuplés, par la mortalité observée dans les classes condamnées au besoin.

La théorie de Malthus fournit un principe général qui explique ces faits et d’autres semblables, et cette explication s’harmonise avec la doctrine qui enseigne que les salaires sont tirés du capital, et avec tous les principes qu’on en a déduits. Suivant la théorie courante des salaires, les salaires diminuent à mesure qu’une augmentation dans le nombre des ouvriers nécessite une plus grande division du capital ; suivant la théorie de Malthus la pauvreté apparaît quand un accroissement de population nécessite une plus grande division des moyens de subsistance. Il n’y a plus qu’à identifier le capital à la subsistance, et le nombre des ouvriers à la population, identification que l’on trouve dans les traités connus d’économie politique, où les termes sont souvent convertis, pour rendre les deux propositions aussi identiques formellement qu’elles le sont substantiellement[1]. Et c’est ainsi, comme l’a établi Buckle dans le pas-

  1. On verra les effets de la doctrine de Malthus sur les définitions du capital en comparant (voyez pages 29, 30, 31) la définition de Smith, qui écrivit avant Malthus, avec les définitions de Ricardo, Mac Culloch et Mill, qui écrivirent après.