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tendance naturelle et un effort constant de la population à croître au delà des moyens de subsistance. »

La doctrine de Malthus, telle qu’on la présente aujourd’hui, peut être résumée ainsi, sous la forme où elle est la plus forte et la moins discutable :

La population, tendant constamment à augmenter, doit, quand on n’y apporte aucun frein, être refoulée par les limites de la subsistance, barrière non pas fixe, mais élastique en quelque sorte, qui rend progressivement toute recherche des moyens de subsistance de plus en plus difficile. Donc, partout où la reproduction a eu le temps d’affirmer son pouvoir, et n’a pas été réprimée par la prudence, il doit exister ce degré de besoin qui tiendra la population dans les limites des moyens de subsistance.

Bien qu’en réalité cette théorie ne soit pas plus incompatible avec le sentiment d’une adaptation harmonieuse faite par la sa gesse et la bienfaisance créatrice, que la croyance commode qui jette la responsabilité de la pauvreté et de ce qui s’ensuit sur les décrets inscrutables de la Providence sans essayer de les découvrir, cependant, en faisant ouvertement du vice et de la souffrance les résultats nécessaires d’un instinct naturel au quel sont liées les affections les plus douces et les plus pures, elle entre rudement en lutte avec des idées profondément enracinées dans l’esprit humain, et a été combattue, sitôt son apparition, avec une amertume dans laquelle il y avait souvent plus de zèle que de logique. Mais elle a triomphalement résisté à l’épreuve, et malgré les réfutations de Godwin, les dénonciations de Cobbett et tous les traits qu’ont pu lui lancer le raisonnement, le sarcasme, le ridicule et le sentiment, elle est aujourd’hui reconnue dans le monde de la pensée comme une vérité acceptée, et par ceux-là même qui volontiers la repousseraient.

Les causes de son triomphe, les sources de sa force ne sont pas obscures. Appuyée, semblait-il, sur une vérité arithmé-