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sant moins défaut que chez nous. « Les chevaux les plus maltraités sont, ainsi que le fait remarquer le docteur Lortet, ancien président de la Société protectrice de Lyon, ceux qui, à cause de leur âge ou de quelque infirmité, ne peuvent plus exécuter le travail qu’on exige d’eux. » Vous les avez vus déchirés par le fouet ou meurtris sous les coups les plus cruels, s’épuiser en efforts impuissants : je vous les montrerai livrés vivants en pâture aux sangsues, torture horrible ! Aux portes de Paris, ils sont encore plus cruellement traités ; forcés parfois de travailler, sans nourriture, pendant les derniers jours de leur vie. Serait-il vrai, comme le docteur Perner, de Munich, le rapporte dans un article reproduit par le Bulletin de notre Société protectrice des animaux, que des équarrisseurs revendent des chevaux au lieu de les tuer, et leur préparent ainsi une longue agonie, car l’acheteur, pour utiliser les pauvres bêtes jusqu’au dernier souffle, les attèle et les bat jusqu’à ce qu’elles tombent mortes. Serait-il vrai qu’un de ces bourreaux, après avoir égorgé de vieux chevaux, les forçait à traverser un champ pour l’engraisser de sang, jusqu’à épuisement complet ?

Parent-Duchatelet, dans un rapport officiel (1827), décrit d’une manière saisissante le clos d’équarrissage où les chevaux arrivent par bandes de douze, quinze ou vingt, attachés l’un à l’autre et pouvant à peine se soutenir. Là, ils sont accumulés dans une petite écurie où il leur est impossible de faire aucun mouvement. Ailleurs, dans un autre clos, ils restent en plein air, attachés aux carcasses mêmes de leurs semblables qui ont été écorchés quelques jours auparavant, et ce faible poids suffit pour les retenir, car, n’ayant pas mangé depuis longtemps, ils n’ont pas la force de les traîner. Souvent ils périssent spontanément sur le lieu même, et la faim qui les tourmente est quelquefois si pressante, que plusieurs, devenus carnassiers, dévorent de longues parties d’intestins dans lesquels se trouvent renfermés quelques débris d’aliments végétaux.

Dans ces foyers hideux, les détritus s’accumulent, détrempés dans une boue infecte et sanglante, au point qu’on ne sait plus comment les utiliser ni même s’en débarrasser. Et là se préparent d’horribles amas de larves, masse fétide et mouvante, d’où sortent ces nuées de mouches que l’on voit disséminées dans l’atmosphère.