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loppées. Chaque école brâhmanique a tenu à honneur de posséder le sien, et le Çâstra n’est en général autre chose que l’amplification considérable et versifiée de quelque Sûtra antérieur, existant ou perdu, sur lequel il fonde la valeur de ses préceptes, à telle enseigne que maint auteur de Sûtra passe pour avoir composé également le Çâstra correspondant : le Code de Manu, par exemple, procède du Sûtra domotique en usage dans la très vieille famille des Mânavas.

Mais la langue des Castras, à elle seule, en dénonce la jeunesse relative : elle n’a plus rien de védique, rien même des archaïsmes épiques qui émaillent encore le Mahâbhârata ; c’est du sanscrit classique, sage et sobre, touffu seulement si on le compare au grec ou au latin, mais largement élagué, indigent et nu en regard de la magnifique efflorescence des formes védiques. Le vers, quand l’ouvrage est en vers, — c’est le cas le plus fréquent, — est ce qu’on nomme en classique le çlôka, c’est-à-dire un genre d’anustubh (p. 28) assez monotone, le sermo pedestris de la poésie hindoue. Ces singuliers articles de code, tous d’égale longueur, se déroulent à perte de vue, avec les clausules diiambiques qui en martellent le milieu et la chute. Il faut avaler cette littérature à petites doses, si l’on ne veut succomber à l’ennui ; mais le style en est habituellement simple et clair, et l’on ne saurait recommander une lecture plus profitable aux débutants qui