Page:Henry - Les Littératures de l’Inde.djvu/63

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

l’Aitarêya (VII, 13-18), de cette admirable légende de Çunahçèpha, qui a inspiré à Leconte de Lisle un de ses plus beaux Poèmes barbares, et où l’on se bornera à cueillir ce trait superbe dans son énergique concision. Des parents réduits à l’extrême détresse ont trois fils ; on leur propose la richesse en échange de l’un d’eux à sacrifiera Varuna. « Pas celui-ci », dit le père en étreignant l’aîné. « Ni celui-ci », dit la mère en étreignant le plus jeune. Le sanscrit dit cela en moitié moins de mots que le français !

Mais c’est presque donner des Brâhmanas une idée fausse, que d’en extraire, à titre de spécimen, de semblables légendes. Ordinairement, le récit, si récit il y a, tient en quelques lignes, en une seule phrase, noyée dans le fatras de technologie théologique qui y a donné prétexte : autant, dès lors, le Brâhmana, ou l’Âranyaka, qui lui ressemble entièrement, intéresse l’historien de la liturgie, autant doit laisser froid celui de la littérature.

Quant à l’Upanisad, sa naïve physique du globe, sa prose tourmentée, la logique plutôt latente de ses déductions, ne l’empêchent pas d’atteindre à la beauté du style et au sublime de la pensée ; mais c’est par éclairs brusques, aveuglants de splen- deur.

« Vois ce grand arbre, mon fils : qu’on l’entaille à la racine, la sève jaillira ; au milieu, la sève jaillira ; au