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compté les clins d’yeux des hommes ; comme un joueur les dés, il manie les êtres à son gré…


Voilà ce qu’est déjà devenu dans le Véda, de par le progrès de l’idée morale, une simple entité du ciel nocturne. Quant au Ciel tout court (Dyaus), il est resté, ainsi que la Terre (Prthivi), à l’état fruste : ce sont deux déités mères el tutélaires, à qui l’on adresse parfois des supplications presque intraduisibles dans leur touchante candeur.


… Immobiles et sans pieds, elles ont des enfants en grand nombre, qui ont des pieds et qui marchent : comme un fils bien aimé dans le giron de ses parents, ô Ciel et Terre, gardez nousdu mal ! — … Invulnérables, doucement secourables sont les deux valves mères des Dieux : confions-nous à elles ; toutes deux parmi les Dieux, et de nuit et de jour, ô Ciel et Terre, gardez nous du mal ! — Jeunes femmes qui vous unissez et reposez côte à côte, sœurs au giron de vos parents, qui baisez l’autel du sacrifice[1], ô Ciel el Terre, gardez-nous du mal ! — … Si nous avons offensé les Dieux, ou un ami, ou le chef de notre famille, que cette prière nous en suit expiation : ô Ciel et Terre, gardez nous du mal !… (Rig-Vèda, I, 185.)


Dans le même esprit d’adoration confiante et de piété filiale, l’Atharva-Véda consacre à la Terre toute seule un hymne malheureusement trop long

  1. Le creux de cet autel est, connue Delphes pour les Grecs, le nombril du monde : le ciel et la terre s’y rejoignent par le feu du sacrifice qui monte de l’une à l’autre.