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terre, Aurore, apporte-nous aujourd’hui le bonheur dans tes rayons ! Elle se rend au séjour de celles qui sont déjà venues, elle, la première de toutes celles qui viendront, la reluisante Aurore, qui suscite la vie, qui éveille tous les morts[1]. — Ô Aurore, tu as fait allumer Agni, tu t’es révélée dans la gloire de Sûrya, tu as éveillé les hommes pour qu’ils offrent le sacrifice : c’est là le noble lot que tu t’es réservé parmi les Dieux. — ... Ils sont partis, les mortels qui ont vu luire la première Aurore ; la voici maintenant qui nous apparaît, et voici venir ceux qui verront les Aurores futures. — ... Toujours dans le passé a lui la Déesse Aurore ; et ici aujourd’hui elle a lui, la généreuse ; et elle luira à jamais sur les jours à venir : toujours jeune, immortelle, elle marche au gré de sa loi. — … Levez-vous ! le souffle vivant est venu à nous ; arrière les ténèbres ! la lumière s’avance. Elle a cédé sa voie à la course du Soleil. Nous sommes au tournant où la vie se prolonge. — Comme avec une rêne, le prêtre guide en haut les prières, le chantre qui loue les resplendissantes Aurores. Aujourd’hui, dans tes rayons, ô généreuse, apporte à celui qui te chante, à nous tous, la vie et la postérité... (Rig-Véda, I, 113.)

Musset serait-il assez dur pour reprocher à notre vieux poète, comme à son illustre contemporain, de

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