Page:Henry - Les Littératures de l’Inde.djvu/222

Cette page n’a pas encore été corrigée

��206 LES LITTÉRATURES DE L'INDE

moyennant un léger effort, n'était plus cependant la langue courantedes milieux populaires 1 , suppléé dans cet office par les nombreux pràcrits qui pullu lèrenl à la faveur de l'extrême division de la grande péninsuleety préparèrent l'avènement des dialectes modernes.

Le sanscrit dit classique est donc, dans une cer- taine mesure, une langue artificielle, née d'un com- promis entre celle des vieux Védas et les idiomes qui en étaient issus, comparable au latin du moyen âge écrit par des gens qui dans l'intimité parlaient français. Mais, codifié, au temps où il allait dis- paraître, par d'excellents grammairiens, il s'est maintenu intact par l'imitation des modèles et se survit de nos jours encore, noble et gracieux témoin de l'unité morale de cette Inde tant de fois conquise et morcelée. Moins riche que le védique en formes grammaticales, il l'est toutefois presque autant que le grec dans la conjugaison, beaucoup plus que lui dans la déclinaison ; et néanmoins la faculté de composition des mots, qu'il a développée à un bien

1. Le plus ancien document daté des langues de l'Inde, ce sont les édits du roi bouddhiste Açôka (III e siècle) ; or ces inscriptions, soigneusement gravées pour être lues et comprises de tous, ne sont pas en sanscrit, mais en un dia- lecte mixte, que M. Senart appelle très heureusement « prâcrit monumental ». D'autre part, on a vu que la pré- dication bouddhiste, pour se répandre parmi les masses, dut, dès le V e siècle, emprunter l'organe d'un prâcrit local, qui est devenu le pâli conservé à Ceylan (p. 79).

�� �