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suite de générations ? Il s’est mélangé d’éléments indigènes : les faibles peuplades soumises étaient moins intelligentes et réfléchies, plus sensitives et impulsives, que leurs conquérants blancs, et par croisement et par emprunt ceux-ci reçurent leur empreinte. Qu’on joigne à ces influences celle d’un climat qui précipite la maturation et alanguit les produits, qui exaspère les nerfs et déprime le vouloir : et l’on comprendra peut-être comment ces parents éloignés nous ressemblent si peu, comment ils ont réalisé, inconsciemment et de bonne heure, dans leur mode de penser, ce que le nôtre, avec sa logique impeccable el bornée, n’a atteint que par un tardif effort de retour sur soi-même, — l’identité des contradictoires. — Pourtant, si peu qu’on les ait fréquentés, on se familiarise assez vite avec eux : ils nous dépaysent bien moins, en tout cas, que les Sémites, dont nous ne nous sommes assimilé l’esprit qu’en le transformant au gré du nôtre. Le fond, après tout, est le même de part et d’autre ; seul nous déconcerte, en nous éblouissant, le lacis capricieux que les siècles ont brodé sur ce canevas uniforme.

Si demain une fouille heureuse mettait au jour un temple grec, intact encore dans son ordonnance intérieure, nous nous y reconnaîtrions sans peine, et l’admiration seule y suspendrait par endroits notre pas. Ici, rien qui détonne, rien qui semble offusquer la sereine majesté de l’habitant divin, ou