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pas dépassé chez eux la limite d’une simple métaphore. Dans l’Inde, la grande épopée nationale, bien postérieure aux Védas, passe, couramment pour l’œuvre du compilateur mythique des Védas et jouit auprès des croyants d’une autorité presque égale ; il n’est aucun livre, ancien ou moderne, qui ne se place expressément sous les auspices d’une divinité ; toute représentation dramatique, quelques légèretés qu’on y exhibe, commence et finit par une prière : et les recueils classiques de sentences épanouissent de précieux bouquets de stances où la beauté féminine triomphe sous ses traits les moins voilés, pour se clore sur une section consacrée à la gloire de l’ascétisme et à la méditation de l’Âme suprême. Étrange pays, où la morale ne se sépare point de la religion, et où l’érotisme fait partie de la morale !

C’est qu’il n’est pas notre frère de race, à un degré du moins aussi rapproché que la communauté de langue l’avait tout d’abord fait supposer. Sans doute, les Âryas parlant le présanscrit, venus du nord-ouest, qui vers l’an 2000 avant notre ère se répandirent dans les deux plaines contiguës de l’Indus et du Gange, étaient de même sang que les ancêtres des Germains et des Celtes, de même sang que ces Hellènes à qui en définitive tout l’Occident doit sa culture ; mais, sous la protection même du régime des castes, comment ce sang serait-il demeuré plus pur que le nôtre durant cette longue