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prototype de la sagesse, toutefois, il s’est dédoublé : Ganêça « chef des bandes » ne fut, sans doute, à l’origine, qu’une de ses nombreuses épithètes ; dans la mythologie çivaïte, il est son fils, dont l’image figure à foison dans ses temples, et le nom, à titre d’invocation, en tête de presque toutes les grandes œuvres littéraires. Ganêça est l’auteur divin du Mahâbhârata. On le représente avec une tête d’éléphant à une seule défense, — l’éléphant est la plus intelligente des créatures, — le ventre pendant, assis sur un rat, l’animal qui pénètre dans les moindres recoins. Il est né de l’union éternelle de Çiva avec Pârvatî son épouse (p. 115) ; car le monstre qui a brûlé l’Amour a une femelle, et, qui plus est, une femelle qui fait corps avec lui : ineffable combinaison d’ascétisme et d’érotisme, dont poètes et mystiques se font un devoir d’accentuer à l’envi la déconcertante antinomie.

Les déesses sont peu nombreuses dans le Yéda. toutes, sauf l’Aurore, figures d’arrière-plan, sans relief ; mais à tout moment il y est question de la çaktî, de la « puissance » de tel ou tel dieu. Or, le mot çaktî est féminin : à force de voir toujours un dieu accompagné de sa çakti, on en vint logiquement à la lui donner pour épouse et à la doter d’un nom approprié. Pour Indra l’on ne se mit pas en frais : il est le dieu puissant par excellence ; en conséquence, aux temps post-védiques sa compagne s’ap-