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nous suffit de nous les représenter. Ce sens de l’espace que l’intelligence serait impuissante à exprimer, ne pourrait être que je ne sais quelle force qui résiderait dans le tréfonds de l’inconscient, et alors cette force ne pourrait nous être connue que par les actes qu’elle provoque ; et ces actes ce sont précisément les mouvements dont je viens de parler. Le sens de l’espace se réduit donc à une association constante entre certaines sensations et certains mouvements, ou à la représentation de ces mouvements. (Est-il besoin, afin d’éviter une équivoque sans cesse renaissante, malgré mes explications réitérées, de répéter une fois de plus que j’entends par là non la représentation de ces mouvements dans l’espace, mais la représentation des sensations qui les accompagnent ?)

Pourquoi maintenant et dans quelle mesure l’espace est-il relatif ? Il est clair que si tous les objets qui nous entourent et notre corps lui-même, ainsi que nos instruments de mesure étaient transportés dans une autre région de l’espace, sans que leurs distances mutuelles varient, nous ne nous en apercevrions pas, et c’est en effet ce qui arrive, puisque nous sommes entraînés sans nous en douter par le mouvement de la Terre. Si les objets étaient tous agrandis dans une même proportion, et qu’il en fût de même de nos instruments de mesure, nous ne nous en apercevrions pas davantage. Ainsi non seu-