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tion sur l'infini doit être la traduction, l’énoncé abrégé de propositions sur le fini ;

3° Éviter les classifications et les définitions non prédicatives.

Toutes les recherches dont nous avons parlé ont un caractère commun. On se propose d'enseigner les mathématiques à un élève qui ne sait pas encore la différence qu'il y a entre l'infini et le fini ; on ne se hâte pas de lui apprendre en quoi consiste cette différence ; on commence par lui montrer tout ce qu'on peut savoir de l'infini sans se préoccuper de cette distinction ; puis dans une région écartée du champ qu'on lui a fait parcourir, on lui découvre un petit coin où se cachent les nombres finis.

Cela me paraît psychologiquement faux; ce n'est pas ainsi que l'esprit humain procède naturellement, et quand même on devrait s'en tirer sans trop de mésaventures antinomiques, cela n'en serait pas moins une méthode contraire à toute saine psychologie.

M. Russell me dira sans doute qu'il ne s'agit pas de psychologie, mais de logique et d'épistémologie ; et moi, je serai conduit à répondre qu'il n'y a pas de logique et d'épistémologie indépendantes de ta psychologie ; et cette profession de foi clora probablement la discussion parce qu'elle mettra en évidence une irrémédiable divergence de vues.