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INTRODUCTION. II couvreur, ni le couvreur à l'homme ils semblent apparte- nir à deux mondes complètement étrangers l'un à l'autre. Et pourtant, le couvreur laisse tomber une tuile qui tue l'homme, et on n'hésitera pas à dire que c'est là un hasard. Notre faiblesse ne nous permet pas d'embrasser l'univers tout entier, et nous oblige à le découper en tranches. Nous cherchons à le faire aussi peu artifIciellement que possible, et, néanmoins, il arrive, de temps en temps, que deux de ces tranches réagissent l'une sur l'autre. Les effets de cette action mutuelle nous paraissent alors dus au hasard. Est-ce là une troisième manière de concevoir le hasard ? Pas toujours; en effet, la plupart du temps, on est ramené à la première ou à la seconde. Toutes les fois que deux mondes, généralement étrangers l'un à l'autre, viennent ainsi à réagir l'un sur l'autre, les lois de cette réaction ne peuvent être que très complexes, et, d'autre part, il aurait suffi d'un très petit changement dans les conditions ini- tiales de ces deux mondes pour que la réaction n'eût pas lieu. Qu'il aurait fallu peu de chose pour que l'homme passât une seconde plus tard, ou que le couvreur laissât tomber sa tuile une seconde plus tôt 1 V. Les LOIS DU HASARD. Tout ce que nous venons de dire ne nous explique pas encore pourquoi le hasard obéit à des lois. Suffit-il que les causes soient petites, ou qu'elles soient complexes, pour que nous puissions prévoir, sinon quels en sont les effets dans chaque cas, mais au moins ce que seront ces effets en moyenne? Pour répondre à cette question, le mieux est de reprendre quelques-uns des exemples cités plus haut. Je commencerai par celui de la roulette. J'ai dit que le