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LE TOUR DU MONDE PARISIEN.

et quatre ou cinq bagues enrichies de diamants ornaient ses gros doigts courts.

Ces sortes de gens consacrent plusieurs centaines de francs à un bijou et regrettent les 30 centimes réclamés par le conducteur.

observation

Le plus sûr moyen de découvrir le caractère et la profession des voyageurs est l’examen attentif de leur mode de paiement. La manière dont sont envoyés les gros sous est ce qui constitue, pour l’observateur sérieux, le critérium de la vérité. J’aurai, plus tard, occasion de revenir sur ce point important.

À peine m’étais-je installé auprès du gros monsieur, et les chevaux n’avaient fait que quelques pas, lorsqu’un gamin escalada le marchepied et vint s’asseoir auprès de moi. C’était un enfant de dix à douze ans, petit et grêle, vêtu de haillons poudreux, et montrant sur son visage et dans tous ses gestes l’insouciance et l’effronterie du voyou parisien. Il fumait les débris d’un cigare ramassé dans le ruisseau voisin.

« Ohé ! cria-t-il, y n’manque pas de place au moins ? »

Mon voisin de gauche daigna faire tomber un regard de compassion sur sa chétive personne ; puis il releva les yeux, se demandant sans doute comment on pouvait vivre sans chaîne d’or et sans épingle ornée de brillants. Pour moi, durement cahoté sur le banc de bois, craignant à chaque instant d’être précipité sur le trottoir par un brusque mouvement de la voiture, je concentrais toute mon attention sur le coude du vieux commerçant, qui avait élu domicile sur ma banquette, entre mes septième et huitième côtes. Quand je commençai à me rassurer sur les suites de cette invasion, nous passions devant la façade du Panthéon.