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LE TOUR DU MONDE PARISIEN.

pas, monsieur, si vous êtes riche, car vous aurez appris plus de choses que n’en méritait votre argent, et le courant de rapines exercées à la Bourse n’a pas de déversoir plus naturel que l’alcôve d’une courtisane.

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Sachez, admirable et patient lecteur, que, ces réflexions trottant dans ma tête, mon omnibus a lâchement abusé de ma préoccupation pour tourner l’angle du boulevard, gravir d’un seul bond la Chaussée-d’Antin, et que je me trouve, à l’heure où je vous parle, dans cette infâme petite ruelle vulgairement nommée rue Chauchat.

Et cependant j’aurais voulu vous parler de mille choses encore, entre autres des gigantesques décorations de notre dernière fête, de la statue de la Paix, élevée au coin de la rue du même nom, des banderoles, des drapeaux, des baïonnettes, des fleurs, et des spectateurs rangés aux croisées, comme des couches de potirons superposés. J’aurais eu d’autant plus de plaisir à vous décrire la fête, qu’ayant loué fort cher pour toute la durée du cortège le sixième bâton d’une échelle double, je n’ai pu contempler pendant sept heures que le jupon indiscret d’une grosse dame, maîtresse du cinquième échelon, et dont les protubérances externes m’interceptaient à la fois la lumière et l’espace[1].

On ne saurait croire combien de choses curieuses il est possible d’observer dans un jupon.

Mais, cher lecteur, puis-je vous livrer les faits recueillis dans cette étude, lorsque mon voyage touche à sa fin, quand

  1. Écrit à l’époque du retour de la guerre d’Italie.