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LETTRES MISSIVES


quel a esté l’estat et disposition de mon Royaume depuis deux ans, et i est encore de present, je suis asseuré qu’elle ne me blameroit d’avoir evite une guerre estrangere, comme je suis contrainct de faire encore ` du present à mon grand regrest ; estant certain, si je m’y feusse en- gagé quand je feis le voyage de Calais (comme, en verité, _j'en avois tres grand desir, et l'eusse faict si j’eusse_ cogneu que la ville d’Ostende n’eustpas peu estre conservée sans cela), que _j’eusse allumé un feu aux quatre coins et au milieu de mon Royaume, qui l’eust consumé, à cause de l’inlidelité, malice et puissance du mareschal de Biron et de ses adherens, les desseins desquels la dicte guerre eust facilitez et non changez, comme il appert de celle de Savoye, en laquelle vous scavés que le dict mareschal ne me servit qu’à regret. Et si lors sa partie eust esté aussy asseurée et bien faicte qu’elle estoit au temps que je fus au dict Calais, il m'eust bien empesclié de prosperer en la dicte ' guerre de Savoye, comme Dieu me feit la grace de faire. V Dites ces choses à ma dite bonne sœur, car elles sont veritables, et l’asseurés que je ne dillere d’entrer en guerre par laulte de bonne volonté ou de courage de me ressentir du mal que l’on me faict, ny d’assister et seconder mes bons amys, voisins et alliez," et me pre- valoir des occasions qui se presenteront, mais pour mieux dresser ma partie et alloiblir celle de ceux que je dois tenir pour ennemys et malveillans. Cependant fassisteray lesdicts Estats le mieux que je pourray. Le roy d’Espagne a bien arresté son party des onze millions d'or, auquel on m'a escript avoir adjousté encore un million, mais il n'en doibt estre payé en Flandres que deux cens mil livres par mois durant trente-six mois, et cent mil pour la nourriture de sa maison par chacun mois, durant le dict temps, et les douze cens mil res- tans sont reservées pour la despense extraordinaire que le dict roy doibt faire au voyage qu’il a deliberé de faire en Portugal aprés les couches de la royne sa femme : voilà ce que l’on m'en mande. Je ne vois pas que ceste provision, si elle n’est bien tost suivye de quelque autre, doibve mettre en grande allarme les ennemys du dict roy ; aussy dit-on que Yarchiduc parle de se tenir ceste année sur la deflensive.