et toutesfois ce sera tout si elle sera composée de douze à quinze
mille hommes, forces qui ne sont suffisantes pour conquerir le dict
pays de Barbarie et en chasserles Turcs, lesquels advertys du des-
sein des dicts Espagnols, ont assemblé jusqu’à trente mille hommes à _
pied et dix mille à' cheval pour presenter et opposer aux autres i
quand ils comparoistront. Vray est que ceux-cy s’attendent d’estre as-
sistez de vingt-cinq ou trente mille hommes, que certainsroys Mores
du dict pays, qui font profession d’inimitié avec les dicls Turcs, leur
ont promis ; mais il est àcraindre qu’ils leur manquent. Au moyen
de quoy je juge ceste entreprise fort hasardeuse,-mesmes estant la
saison si advancée qu’elle est ; tellement que plusieurs ont opinion
qu’il en adviendra autant qu°à celle de l’année passée, laquelle fut
dressée à grands frais pour la mesme entreprise et ne tpassa l'isle de
Maiorque. '.
" Nous verrons pareillement quelle issue aura ceste année la guerre
des Pays—Bas, en laquelle, combien que le prince Maurice n’ayt peu
faire ce qu’il avoit deliberé quand il s’est mis en campagne (qui es-
toit de passer avec son armée jusqu’en Flandres pour faire lever le
siege d’Ostande), toutesfois il a eu _jusqu’à present un grand advantage
`sur les archiducs, car il a assiegé la ville de Grave à la vue de l’armée
des autres, commandée par l'admiral dlAragon, et semble que la prise
n’en puisse estre empeschée par les autres, par le bon ordre que le
dict prince a donné à la seureté de son camp ; aussy ont-ils ja retiré
leur armée du lieu où ils l'avoient advancée, et depuis la dicte re-
traite, une grande partie d’icelle's’est mutinéeou desbandée ; telle-
ment qu’elle est aujourdhui alfoiblie de là moitié, et le dict prince
poursuit son siege sans empeschement. Dlailleurs les Estats ont si
_ bien rafraischy d’hommes, de vivres et de munitions de guerre la
ville d’()stande, qu’elle est en estat de se conserver et deffendre mieux
que jamais, de sorte qu’il n’y a apparence d’esperer que les dicts ar-
chiducs la forcent. Ce pendant la royne d’Angleterre ma bonne sœur
et cousine pourra achever à son aise de nettoyer l'Irlande de la rebel-
lion qui y reste par force ou par douceur. Il faut considerer aussy que
rnrrazs ne mmm xv. --v. i 85
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DE HENRI IV.