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tris Amplitudinibus est commendatus, aures et fidem præbeatis, etiam atque etiam petimus. Dominus felicem vestram et florentem Rempublicam diutius velit ad nominis sui gloriam conservari. Bene valete, Viri amplissimi et prudentissimi.

Neraci, pridie calendas augusti, anno 1583.

Vester bonus amicus,


HENRICUS :
ALLIARIUS.

Salutem et officia[1].




1583. — 31 juillet. — IIme.

Imprimé. — Henrici, Navarrorum regis, epislolæ, etc. Utrecht, 1679, in-12, p. 23.


AD DANIÆ REGEM[2].

[3] Serenissime Rex, Consanguinee et Frater charissime :

Quot et quantis bellorum procellis, his proxime superioribus annis in Gallia agitati fuerimus, non puto Serenitati vestræ esse igno-

  1. Le secrétaire du Pin, en contre-signant, a ajouté, pour son propre compte, cette dernière salutation.
  2. Frédéric II, fils aîné de Christian II, roi de Danemarck, et de Dorothée de Saxe, couronné en 1542 par son père, lui succéda le 1er janvier 1559, et mourut le 4 avril 1588.
  3. Cette lettre est précédée du protocole suivant : « Henricus, Dei gratia, Navarrorum rex, princeps Bearniæ, dux Vindocinensis, Belmontensis, Albretensis, etc. comes Forensis, Armeniacus, Ruthenensis, Bigoronensis, Marlensis, Petragoricensis, etc. vicecomes Lemovicensis, etc. serenissimo principi domino Frederico, Dei gratia, Daniæ, Norvegiæ, Gotthorum, Vandalorumque regi, salutem in Domino perpetuam. » Voici la traduction de cette lettre :

    AU ROI DE DANEMARCK

    Sérénissime Roi, très-cher Frère et Cousin, Votre Sérénité n’ignore pas sans doute à quels nombreux et violents orages le royaume de France a été exposé durant ces dernières années. Hélas ! à ma grande douleur, le bruit de nos misères a dû sétendre jusque dans les régions les plus lointaines.

    Enfin, grâce au Dieu tout-puissant, échappé à ces orages, nous avions formé le projet sérieux de visiter successivement tous les rois et princes de l’Europe qui travaillent à la propagation de la saine doctrine. Nous ressentons un désir inexprimable de contempler les traits de ceux qui nous sont unis par un même zèle pour la vérité et par une même opinion sur la pureté de la foi ; nous espérions qu’après avoir visité et contemplé ceux que nous aimions et admirions déjà à tant de titres, nous reviendrions plus raffermi et en même temps plus aptes à accomplir la tâche que Dieu nous a imposée, de défendre les siens.

    Un autre motif nous engageait encore à entreprendre le voyage dont nous parlons, et auquel nous étions déjà si disposé. Nous nous désolions et inquiétions profondément en voyant les cœurs de ceux qui auraient dû unir tous leurs efforts pour achever la culture du champ du Christ, s’ulcérer de jour en jour et s’exaspérer les uns contre les autres, au point de songer plus à satisfaire leurs inimitiés particulières qu’à répandre la vraie doctrine religieuse. Chose déplorable ! dans cette conflagration générale des esprits qui a déjà duré si longtemps,le grand nombre s’occupe à attiser le feu, bien peu travaillent à l’éteindre, témoin les efforts incessants des évêques de ce royaume pour lui fournir de nouveaux aliments.

    Dans ces périlleuses conjonctures où se trouvent les Églises, a brillé surtout l’éminente vertu de Votre Sérénité et son zèle si digne d’un prince chrétien. Grâce à elle, le foyer de l’incendie a été quelque peu resserré, et les hommes pieux et bien intentionnés ont pu commencer à mieux espérer de l’avenir de la République Chrétienne. On ne doute plus que, si les autres princes chrétiens déployaient pour la pieuse et sainte cause de l’Église le même zèle que Votre Sérénité, la paix et la tranquillité ne fussent en peu de temps rétablies.

    Pour revenir au projet que nous avions formé, nous nous flattions qu’en visitant les rois et les princes dont nous avions entendu célébrer si souvent et d’une manière si éclatante le zèle admirable et l’ardeur brûlante pour la religion, nous parviendrions, moyennant des conférences avec tous les opposants, à pacifier les esprits et à ouvrir une voie de paix et de tranquillité pour l’Église. Ce résultat une fois obtenu, nous ne désespérions plus de ruiner facilement nos ennemis communs et d’amener le triomphe prochain du Christ sur l’Antechrist. En effet, si, divisés, nous avons pu lutter contre eux avec succès ; une fois unis et d’accord d’esprit et de volonté, nous pourrons aisément les écraser.

    Mais, au moment où nous étions tout occupé de ce projet de voyage, des difficultés nouvelles, qui s’élevaient de jour en jour, nous ont empêché de l’accomplir ; et aujourd’hui surtout les intérêts publics, aussi bien que les intérêts privés, nous retiennent forcément ici.

    Quoique ces difficultés aient ainsi dérangé nos projets, elles n’ont pu nous les faire complétement abandonner. Cherchant à en amener la réalisation nous avons cru trouver un moyen très-convenable, en contient l’entreprise que nous ne pouvons nous-même exécuter, à un personnage éminent qui, par sa vertu, sa probité et le rang qu’il tient auprès de notre personne, nous représentât dignement.

    En conséquence, nous avons choisi un noble seigneur, qui nous est cher à beaucoup de titres, qui remplit de la manière la plus honorable les fonctions de surintendant de notre maison et de chef de notre conseil privé, le sieur de Ségur-Pardaillan, sur l’habileté et le dévouement duquel nous nous reposons complétement de cette tâche. Nous lui avons ordonné de se rendre auprès de Votre Sérénité pour traiter diligemment avec elle de tout ce qui concerne le salut des Églises réformées.

    D’aucune part nous n’espérons un secours plus efficace pour cet objet que de Votre Sérénité. L’intérêt qu’elle mettra à nos affaires en général, et surtout à celle-ci, sera d’un grand poids et d’une grande autorité auprès des autres princes de l’Allemagne ; nous en avons eu naguère la preuve lorsque votre Sérénité a bien voulu s’intéresser en notre faveur auprès de l’illustrissime prince de Saxe, électeur et grand maréchal du Saint-Empire, son auguste frère.Nous supplions donc humblement Votre Sérénité d’accueillir, avec la même faveur et la même confiance que s’i1 nous voyait et entendait nous-même, le cher et bien aimé ambassadeur que nous déléguons à l’effet de traiter d’affaires aussi utiles et aussi importantes pour toute la République Chrétienne. Notre envoyé expliquera amplement à Votre Sérénité tout ce dont nous l’avons chargé dans ses instructions, et n’omettra rien de ce qu’elle pourrait désirer savoir de nous.

    Ayant donc confié à son inviolable fidélité et à sa sagacité parfaite tout ce qui concerne la grande affaire dont il entretiendra Votre Sérénité, nous ne la retiendrons point par une plus longue lettre, et nous la supplierons humblement de nous continuer la bienveillance qu’elle nous a déjà montrée, de compter sur tous nos sentiments d’amour et de respect et sur notre dévouement à sa personne. Nous prions le Dieu tout-puissant de conserver très-longtemps Votre Sérénité en parfaite santé pour le salut des affaires désolées de l’Église.

    Donné à Nérac, ce dernier jour de juillet 1583.


    HENRY :


    L’ALLIER,

    Par mandement de S. M.