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de Sully, y fut un temps fort douce et plaisante : car on n’y parloit que d’amour et des plaisirs et passe-temps qui en dépendent. » Mais le repos ne s’étendait guère au delà de ce séjour privilégié. Dans les lettres écrites alors, on ne parle au contraire que de guerre, de violences, de pillage et de graves intérêts religieux. L’esprit de parti, toujours ainsi alimenté par la guerre civile, était plus fort que toutes les déclarations de paix. Aucune convention n’était respectée. Une assemblée succédait à une autre : celle de Montauban à celle de Nérac ; celle de Mazères à celle de Montauban. Le roi de Navarre ne cessait de se plaindre des infractions des deux partis, d’assurer la cour de sa soumission, tout en entretenant des intelligences avec les divers mécontents qui entouraient ses provinces. C’est en de telles circonstances que se régularisa, vers la fin de cette année, la dernière assemblée tenue, avec l’agrément du Roi, à Mazères, et où se rendit le duc de Montmorency, gouverneur du Languedoc.


1580.

La conférence de Mazères n’eut aucun résultat, ou même servit plutôt à aigrir les esprits qu’à les concilier. Des deux côtés, de nombreuses escarmouches, dans les premiers mois de cette année, firent présager l’éclat d’une prochaine rupture. Le prétexte en fut la sommation de rendre les places de sûreté. Tous les historiens du temps s’accordent à voir dans cette nouvelle prise d’armes des protestants le résultat des insinuations de Marguerite, et de la séduction des femmes de sa cour. Ce fut la guerre des amoureux, comme la nommèrent les contemporains.

La déclaration de guerre se fit le 10 avril. Tout le parti était prévenu. Châtillon en bas Languedoc et Lesdiguières en Dauphiné devaient, d’après un signal, agir au même instant que le roi de Navarre. Sur soixante entreprises que ce prince avait combinées pour éclater à peu près simultanément, il n’en réussit qu’un fort petit nombre. Les plus importantes furent sur La Fère en Picardie et sur Cahors, deux villes qui appartenaient à Marguerite. Cette princesse joua un rôle fort actif dans toute la politique des guerres civiles de cette année. Elle découvrit une embuscade préparée contre son mari ; et, lorsque à l’automne, malgré toute une suite d’exploits fort brillants, près de ne pouvoir plus résister au maréchal de Biron, il ne lui restait de ressources que dans un