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plupart des hommes de lettres chanteroient ses louanges ; le génie même, ébloui par ses conquêtes, s’aviliroit peut-être en lui présentant des complimens adulateurs sous la forme de menace niaise, dans le genre de celle qu’adressoit Boileau à Louis XIV.

« Grand roi, cesse de vaincre, ou je cesse d’écrire. »

Des libellistes, humblement soumis à la censure de la police africaine, iroient journellement chercher le mot d’ordre dans une antichambre ; ils seroient chargés de diffamer les écrivains qui refuseroient de prostituer leurs plumes et tout homme à caractère qui, même sans être frondeur, ne se déclareroit pas admirateur de Genseric ; ils répéteroient, jusqu’à la satiété, qu’il est le Père de ses sujets, l’objet de l’amour et de l’admiration générale ; dans l’espérance qu’il daigneroit abaisser sur eux un regard protecteur, ils canoniseroient le Salomon, le Titus, le Trajan, le Marc-Aurele qui auroit daigné conquérir l’Europe et qui daignera la régénérer ; et comme on apprécie presque toujours la légitimité