Page:Henri Deberly Le Supplice de Phèdre 1926.djvu/241

Cette page n’a pas encore été corrigée
239
LE SUPPLICE DE PHÈDRE

— T’abandonner ! s’écria-t-elle en quittant sa place pour venir prendre avec amour et désolation la face du jeune homme dans ses mains. En est-il question, mon grand fou ? Rends-moi justice, t’ai-je négligé, m’as-tu connue froide, et, aujourd’hui, peux-tu douter une seconde de moi ? Je n’ai en vue que ton bonheur, tu le sais fort bien.

— Alors, restez ! murmura-t-il.

Elle secoua la tête.

— Voyons, réfléchis !… Ton grand-père…

— Ce n’est pas lui qui vous réclame ! interrompit Marc. Tout à l’heure, petite mère, vous l’avez avoué ! Il a ses bouquins, ses bibelots… Tant qu’un grimoire non déchiffré le sollicitera, soyez sûre que grand-père supportera la vie sans demander rien à personne… Moi, si vous me laissez, que deviendrai-je ?

Il avait dit ces derniers mots avec déchirement. En même temps, son visage, d’un mouvement câlin, s’était blotti contre la taille de sa jeune belle-mère qui, se penchant, le vit sous elle, les paupières mi-closes, les traits empreints de l’expression qu’il avait jadis lorsqu’il implorait une faveur. Bouleversée, mais vaillante et encore lucide, elle mesura d’un vif coup d’œil cette force inconsciente et les moyens de résistance dont elle disposait. Tout à coup, elle sentit qu’elle allait faiblir. Ce fut assez, tant les menaces d’un futur commun se dépeignirent à son esprit avec précision, pour lui faire détester l’attitude de Marc qui, stupidement, par des prières, ébranlait son cœur et compromettait leur salut.