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LE SUPPLICE DE PHÈDRE

et l’avait perdue, l’indignation le transportait non seulement contre elle, mais contre lui qui, de guerre lasse, s’était convaincu que sa froideur était la cause de son abandon. Se pouvait-il que, par sa faute, la plus belle des chances se fût gâtée jusqu’à finir dans cette catastrophe ? Nuit et jour, dormant peu, ne mangeant qu’à peine, influencé par le chagrin au point d’en maigrir, il recherchait passionnément, mais sans résultat, le moyen de fléchir Mme Aliscan. Toutes les puissances de persuasion dont il disposait, il les avait mises dans ses lettres. Devant elle, trop ému, il aurait tremblé. L’adolescence n’a pas encore cet œil audacieux qui, d’un ensemble examiné d’événements contraires, dégage le succès d’une manœuvre. L’unique façon que connût Marc d’obtenir une grâce était d’aller avec tendresse la solliciter en donnant l’assurance de sa contrition. Sa belle-mère, autrefois, l’y avait rompu. Mais, pour user de cette ressource envers sa maîtresse, encore eût-il au moins fallu qu’il la vît chez elle et l’idée même d’y parvenir en forçant sa porte ne l’avait jamais effleuré.

Chaque matin ajoutait à son désespoir. C’est qu’avec lui ressuscitait, pour mourir bientôt, l’agitation liée dans les âmes que torture l’attente au premier passage du facteur. Ce feu tombé, son jeune visage légèrement défait regagnait à l’instant toute son amertume. En constatant que sa douleur persistait ainsi, Hélène fut prise d’un inquiétude à ce point violente qu’elle détesta comme un conseil de sa nonchalance le propos d’inaction qu’elle avait