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LE SUPPLICE DE PHÈDRE

femme déjà mûre n’imagine pas un seul instant qu’elle puisse le tromper. Il sait trop à quel point il est tout pour elle. Certains accents qu’il n’entendra que d’une bouche flétrie, déjà son cœur, par un instinct singulièrement fort, l’avertit qu’ils expriment quelque chose d’unique. À mille lieues du motif de cet abandon, Marc avait fait, séance tenante, plusieurs conjectures sans en trouver une d’acceptable. La plus sensée, à l’examen, s’en allait en poudre. De nouveau, le soir même, il avait écrit. Mais, redoutant une défaillance de sa volonté, la pauvre femme qu’il implorait n’ouvrait plus ses lettres et sa chaleur, son désespoir étaient restés vains.

En lui, du coup, s’était produite et consolidée une révolution surprenante. Il n’avait plus pour sa maîtresse, depuis fort longtemps, qu’un désir traversé par des répulsions. S’il l’avait recherchée aussitôt guéri, c’était par suite moins d’une langueur ou d’une inquiétude que d’un vif dépit d’amour-propre. Brusquement, privé d’elle, il s’était rongé. Pour sa tête et son cœur pareillement fiévreux, rien, dans la ville où respirait Mme Aliscan, n’avait plus compté que cette femme. Les grands reproches qu’il lui faisait s’étaient évanouis. Occupant sa mémoire sans rivalité, peu à peu revêtue par sa convoitise jusque des grâces qu’en déclinant la jeunesse emporte, elle s’était mise à rayonner sur son existence comme la figure même de l’amour. Et de quels gémissements il la poursuivait ! Plein de quels remords, de quel feu ! À la pensée qu’il l’avait eue