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LE SUPPLICE DE PHÈDRE

C’était celle d’une agence de police privée. Des inscriptions y rayonnaient, en caractères bleus, autour de l’image d’une serrure par le trou de laquelle un œil grand ouvert luisait d’un éclat surprenant.

Après avoir machinalement déchiffré les textes, elle commença par écarter comme une infamie la pensée qui, soudain, l’avait traversée. Une femme honnête ne recourt pas à des procédés qui l’obligent à se mettre en étroit contact avec ce qu’une nation compte de plus bas. Même grimés en soutiens de l’ordre établi, les délateurs ne sont-ils pas les voisins des traîtres ? « Plus répugnants que ces derniers, » se disait Hélène, « puisque, dans l’ombre où ils s’agitent, couverts par les lois, ils n’ont pas même à témoigner d’un certain courage. » Mais quel pouvoir de séduction exerçait sur elle la perspective d’être informée des actions de Marc sans se livrer personnellement à l’odieux contrôle qu’elle brûlait, au fond, d’instituer ! Quatre ou cinq jours, elle fit effort pour se dérober à la tentation grandissante. Justement, plusieurs murs se couvraient d’affiches où s’étalaient, crus et perfides, la serrure et l’œil, et toutes les fois que la jeune femme avait à sortir son regard tombait sur quelqu’une. À chaque rencontre, elle se disait que, pour que l’agence pût engager une telle dépense de publicité, il lui fallait avoir déjà un gros train d’affaires, une clientèle considérable et donc bien servie. C’était la preuve que les scrupules qui l’importunaient étaient assez peu partagés. Bientôt,