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LE SUPPLICE DE PHÈDRE

sans nulle coquetterie, elle se sentait comme une avare devant ces chiffons mis en valeur par le travail de la couturière. Les chapeaux lui rendirent une certaine aisance. Ils étaient six, qu’elle enfonça d’un geste énergique et commenta successivement, le visage radieux, s’admirant dans une glace, mais tournée vers Marc. Avec chacun, elle reprenait une quelconque des robes. C’était alors une digression sur cet assemblage, considéré, selon les cas, soit dans sa justesse, soit du côté de l’imprévu qu’il offrait aux yeux. Marc, étourdi, laissait tomber des approbations qui, de distraites, se précisèrent et devinrent plus chaudes. Un plaisir artistique s’éveillait en lui. Sur une dernière combinaison qu’Hélène mit au point, transporté d’enthousiasme, il lui déclara :

— Pas à dire, petite mère, vous êtes épatante !

Ce fut pour elle comme si l’accent d’une bouche prophétique venait d’éclairer son destin.

Malgré cela, par habitude, elle fit observer :

— Je t’assure qu’étonnante aurait pu suffire…

Il défendit sa locution. Leurs rires s’accordèrent. Jamais encore, l’un envers l’autre, oubliant toute règle, ils ne s’étaient sentis si libres et si camarades. Dans leurs yeux rayonnait une complicité. Ces toilettes étalées, ces chapeaux en vrac les rapprochaient comme deux enfants séparés par l’âge un profond amour du même jouet.

Beaucoup plus rapidement qu’il n’avait grandi, le malaise d’Hélène disparut. Avec l’orgueil de sa nature et connaissant Marc, elle ne doutait de