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LE SUPPLICE DE PHÈDRE

dance. Nulle entreprise ne lui causait plus noble émotion que d’inspirer à son vieux père une idée flatteuse du jeune homme élégant qu’elle avait formé. Son esprit s’appliquait à le définir, toute sa finesse à rechercher dans son personnage les qualités et les défauts les plus sûrs de plaire, et souvent même, par amour-propre, elle mentait sur lui. Pareille ardeur divertissait le comte de Kerbrat, généreux lui-même par nature, au fond, ravi, quand sa mémoire lui rendait une trace des méthodes violentes de sa fille, qu’elle eût passé de la cravache à tant d’enthousiasme. Il n’essayait d’en modérer les démonstrations qu’à des moments où, bien que vues avec indulgence, elles lui paraissaient excessives. Car, alors, l’ironie reprenait ses droits, sa forte tête, sollicitée trop indiscrètement, refusant tout net l’adhésion.

Hélène, un jour, lui présenta deux esquisses de Marc, faites à la diable et rehaussées de touches d’aquarelle. L’une montrait un vieil arbre à demi ruiné, non loin duquel, en plein soleil, sur des verts trop crus, prospérait un massif de rhododendrons, l’autre, une Bretonne à la fontaine qui lavait du linge.

— N’est-ce pas, père, lui dit-elle, que c’est étonnant ?

Le gentilhomme prit son pince-nez, le fixa sans hâte et souleva les deux croquis d’un geste étendu pour les exposer au grand jour.

— Honorable ! fit-il après examen. Ça manque un peu de légèreté, la couleur bafouille, voici des