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LE SUPPLICE DE PHÈDRE

charpentes n’était égalée que par celle des velours et des tapisseries qui en recouvraient un bon nombre.

Nulle élégance, mais du confort et des grâces naïves. Une odeur de fruitier quand les pommes sont mûres. Au demeurant, séjour austère, cette maison bretonne et ce grand jardin presque inculte, pour une jeune femme toute au supplice des regards amers qu’elle promène depuis peu sur sa destinée ! Hélène, d’abord, en éprouva la mélancolie jusqu’à céder, dans le secret, à des crises de larmes. Celles-ci la gagnaient vers le soir. Plus elle tentait d’y échapper en se contractant, plus elle les rendait orageuses. « C’est ici, » pensait-elle, « que ma vie s’est faite ! Jolie fille, assez riche, pouvant tout prétendre, j’y suis venue, sans discussion, choisir un homme veuf, dépourvu de tout charme et précoce vieillard ! Qu’avait-il donc pour me séduire, pour m’influencer ? » se demandait-elle à haute voix, avec l’accent et l’expression, si proches de l’angoisse, dont on cherche une excuse à une folle conduite. Elle revoyait à ses côtés, dans un deuil sévère, ce prétendant cérémonieux d’au moins trente-huit ans qui, ne pouvant, même en pleine cour, secouer son air digne, paraissait ne songer qu’à sa première femme, Aussitôt, les images se multipliaient. Trop baignée d’amertume pour séparer d’elle l’adolescente assez virile et peu susceptible qui s’était jadis accordée, elle prêtait à celle-ci toutes ses répulsions et, retrouvant dans sa mémoire les mille circonstances