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LE SUPPLICE DE PHÈDRE

Car, aussi loin qu’elle remontait dans leur longue union, elle en voyait toutes les années également plaisantes ou, si l’on veut, d’un coloris aussi monotone dans son évidente gracieuseté. Ni fort soleil, ni vraie bourrasque : un air tiède et pur. Quelquefois un rayon, mais qui durait peu, l’âme de Michel, parfaitement droite, étant sans grandeur. Même idolâtre, et, de sa femme, il l’était assez pour lui soumettre aveuglément et sans amertume bien des préférences personnelles, il manquait de cette flamme dans l’adoration qui en éveille, puis en échauffe, puis en brûle l’objet. Trop de sagesse et de calcul gâtait tout chez lui. Ses attentions lui rapportaient mille remerciements, jamais un regard passionné. Douze ans plus tôt, dans la personne d’Hélène de Kerbrat, il avait eu la bonne fortune d’épouser une femme que la tournure de son esprit et sa dictinction éloignaient sinon du plaisir, du moins d’y prendre un intérêt qui l’aurait perdue. Avec une autre en pleine jouissance de cette liberté qu’octroyait largement sa carrière nomade, même supposé que les grandes lignes de leurs caractères se fussent, dans l’ensemble, accordées, il aurait encouru de sérieux mécomptes. Hélène s’était accommodée d’un bonheur moyen. Des certitudes bien définies constituaient la part qu’elle avait cru, dans sa jeunesse, pouvoir accepter, Et jamais elle n’avait ni visé plus haut, ni déploré profondément, d’une manière suivie, d’avoir à le faire aussi bas.

Cependant, lorsqu’elle sut son mari en route, sa première idée fut celle-ci :