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trouve de l’esprit. Mais, tels quels, je les aime…

Et les nuits à Montmartre, ces nuits que remplissait l’innocent plaisir d’entendre le bruit des bastringues et de confesser au champagne de petites courtisanes merveilleusement bornées. Tous les maîtres d’hôtel, tous les portiers et tous les chauffeurs nocturnes de la rue Pigalle me connaissent par mon petit nom. Les trafiquants de cocaïne me haïssent parce que mon air florissant et les pivoines de mon teint font, par l’exemple, du tort à leur commerce. Tout cela est loin, et je me demande si je reverrai jamais les halles matinales où, suivant ce goût des traditions que vous me connaissez, je menai souvent le chœur de mes compagnons.

Ah ! monsieur, cela me fend le cœur de parler de ces choses. Comme j’étais heureux ! Et je l’ignorais. Maintenant j’ai, pour mes fauteuils de cuir, pour mes sombres armoires, pour mon pot à tabac, le cœur d’un exilé. Je ferme les yeux et