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Mon sommeil fut compté comme celui d’un forçat. Ce fut atroce : je me reprochais un bon repas, une grasse matinée, un verre de chambertin, comme une imprudence sans remède.

Durant les six semaines que dura cette abomination, je passais comme un loup affamé devant mes restaurants favoris et je fuyais tout le jour mon appartement, de peur que l’envie de dormir ne fût plus forte que ma volonté.

Un jour, je m’assis, la faim au ventre et noyé de fatigue, à la terrasse d’un café. Un couple passa ; la femme sourit et je l’entendis qui, me montrant du regard à son compagnon, murmurait :

— En voilà un qui ne doit pas se priver !

Ce fut une leçon.

Je ne me privai plus, en effet. Alors, je m’aperçus que les régimes, s’ils ne font pas maigrir, empêchent du moins d’engraisser. Je me mis aussitôt à enfler comme une bosse sur un front, sous