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Cet amer propos me surprit. L’excellent homme posa sa main sur mon genou :

— Ça n’empêche pas les sentiments, dit-il. L’âge d’aimer n’existe pas. Ce qui existe et qui passe c’est l’âge d’être aimé. Tant pis pour l’homme rassis qui n’a fait, comme Ulysse, un beau voyage. Une fois le temps passé, adieu…

— Eh bien, dis-je, vous n’êtes guère encourageant.

— Mais si. Je vous dis qu’une fois la belle jeunesse partie nous nous valons tous. Toutes les femmes, aussi bien Hélène que Velleda, aiment Apollon et Adonis. Mais elles se résignent aussi bien à la tripaille de l’hilare Bacchus qu’à la carrure du massif Hercule ou au front sévère d’Esculape. Gras ou maigres, ventres ronds ou côtes en persiennes, fossettes ou salières, doubles mentons ou grosses pommes d’Adam, qu’est-ce que ça peut fiche ! Dès l’instant que la femme se donne avec sang-froid et cherche en nous autre