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de Remiremont, on continuait à travailler le granit[1]. Ce travail s’exécute par un mécanisme fort simple.

REMIREMONT. Il serait long de détailler toutes les sottises féodales, toutes les redevances absurdes que les dames de Remiremont pouvaient exiger. Bornons-nous à celle-ci. Le lendemain de la Pentecôte, sept ou huit paroisses du voisinage de cette ville étaient obligées de se rendre processionnellement à l’église des chanoinesses, en chantant des fatras rimés en vieux gaulois, qu’on appelait kiriaulé ou kriaulé[2]. Une de ces paroisses devait apporter des branches de cerisiers, une autre de l’aube-épine, etc. Celle de Saint-Maurice devait fournir un plat de neige ; à défaut de neige, deux bœufs blancs ; à défaut de bœufs, elle payait une somme déterminée. Enfin la révolution a supprimé ces usages grotesques, que quelque nouveau Ducange (sic) classera un jour avec la fête des fous, celle des calendes, etc.[3].

HÉRIVAL. On assure que jamais la peste n’a dévasté le vallon où est situé ce monastère, quoiqu’elle ait plusieurs fois visité la Lorraine, et que jamais le tonnerre n’y est tombé. C’est peut-être l’effet de la position d’Hérival, dont la gorge étroite et profonde est défendue de ces fléaux par les montagnes environnantes.

Buffon, dans ses époques de la nature, parle de la roche de Peute-Voye, située au bas du vallon ; c’est un fait comme tant d’autres qu’il a accumulés pour en tirer de fausses conséquences. La roche de Peute-Voye paraît avoir été rompue par quelque grande commotion de la nature, ou par l’effet des eaux abondantes dans ce vallon, qui avaient formé un lac avant qu’elles se fussent ouvert une issue par l’effraction du rocher, dont les immenses débris couvrent la terre des deux côtés opposés. On voit encore des fragments

  1. Ce bel établissement industriel existait anciennement à Remiremont et avait été transporté à la Mouline en 1776 par M. Patu-Deshauchamps. C’est de ses ateliers, aujourd’hui en ruines, que sont sortis les beaux bénitiers et le magnifique pavé de l’église Sainte-Geneviève de Paris.
  2. Voir notre notice intitulée : les Kyriolés de Remiremont, insérée, page 146—153, dans l’annuaire des Vosges de l’année 1838.
  3. Dans la notice précitée, nous avons dit que le jour des kyriolés devait, par la variété des amusements qu’on trouvait à Remiremont, rappeler un peu ce qu’on nommait la liberté de décembre dans les anciennes fêtes de calendes et des saturnales chez les Romains.