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Une question délicate se posait. Ces textes si divers appartiennent-ils bien tous à Helvetius ? Nous remarquerons qu’aux citations évidentes, aux extraits se joint fréquemment l’indication de l’auteur, de l’ouvrage. Quant aux pensées proprement dites, elles présentent, en général, des ratures, des additions, des corrections de toute espèce qui témoignent, d’une façon incontestable, de la recherche personnelle. Prenons plusieurs exemples de genres différents : Amasones ces terribles et aimables guerriers qui par la puissance de leur armes ou de leur yeux vainquaient leur ennemis… ensuite on lit : a mettre en qui est barré, puis : ainsy la Vérité par sa force ou sa beauté triomphe des cœurs indociles. L’auteur, le poète a d’abord trouvé la comparaison et il la note pour ne pas l’oublier. — Les charmes d’une maîtresse (on lit d’abord les yeux barré) même absente assiège vos yeux sa voix assiège vos oreilles tout sert d’aliment a l’amour pour l’étendre et l’accroitre l’amour qui demandoit… On lit entre deux lignes au-dessus d’amour : ce don du ciel, etc… — Les bons esprits sont (dans l’harmonie : dans l’harmonie barré) comme (dans un concert : dans un concert barré) une belle voix seroit dans un concert, etc… — Public son jugement est (ajouté sur la ligne : pendant la vie d’un auteur) une onde agitée qui monte qui baisse mais cependant (ajouté sur la ligne : a la fin) qui attrappe son calme. — Dieu veut que nous soions dans l’erreur et l’ignorance de certaines choses puisque nous ne les comprenons pas (de barré) pour toutes les choses qui nous sont nécessaires (a la vie ajouté sur la ligne) Dieu les a imprimé dans les esprits les plus vils comme (dans ajouté) les plus relevés, etc…, etc…

J’ai tenu à signaler, dans un certain nombre de cas, ces additions, ces ratures, ces corrections de manière à laisser au texte, autant que possible, sa véritable physionomie. Je me suis efforcé de mettre en lumière les passages les plus saillants, les plus caractéristiques, les plus susceptibles de nous renseigner sur l’âpre analyse du moraliste et la tentative généreuse du philosophe politique.

Moraliste, Helvetius qui avait des dons puissants d’observation et de méditation est de l’école de Montaigne, de La Rochefoucauld, de La Bruyère et, avec sa faculté brutale de saisir le réel et de le décomposer, il garde son entière personnalité. Philosophe politique, obsédé par l’idée de créer une science exacte et profitable des mœurs, il s’est heurté à toute sorte de mécomptes. C’était une