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Mais, dira-t-on, l’homme que l’on consulte peut sans doute se faire illusion à lui-même, attribuer à l’amitié ce qui n’est en lui que l’effet de sa vanité : mais comment cette illusion passe-t-elle jusqu’à celui qui consulte ? comment n’est-il pas à cet égard éclairé par son intérêt ? C’est qu’on croit volontiers que les autres prennent à ce qui nous regarde un intérêt que réellement ils n’y prennent point ; c’est que la plupart des hommes sont foibles, ne peuvent se conduire eux-mêmes, ont besoin qu’on les décide ; et qu’il est très facile, comme l’observation le prouve, de communiquer à de pareils hommes la haute opinion qu’on a de soi. Il n’en est pas ainsi d’un esprit ferme : s’il consulte, c’est qu’il ignore. Il sait que, dans tout autre cas, et lorsqu’il s’agit de son propre bonheur, c’est uniquement à